[Tops de l’été] Cinq parmi tant d’autres en 2015

Deuxième round pour nos tops 2015, orchestré par Lucius. Réussira-t-il à se passer de Patton, l’espace d’un instant ? Ou même à respecter le moindre cadre ? *

The Shape Of Music To Come

The Shape Of Jazz To Come de Ornette Coleman a redéfini le Jazz à sa sorti. C’est en me basant sur ce critère que j’ai fait le tri de mes coups de cœurs en 2015 : chacun d’eux a apporté un vent d’originalité dans son domaine.

#1 – Refused : Freedom

Refused Freedom

Refused est né dans les années 90, au moment où le mouvement Hardcore s’élevait aux USA. Saisi du froid de Suède, leur son ne se démarque de la concurrence qu’à partir leur deuxième album « Songs to fan the flames of discontent » , âmes sensibles s’abstenir (c’est un mélange de Slayer, Metallica et Sick of it All). Après une tournée mitigée, le groupe est enragé et retourne en studio gonflé à bloc pour le prochain album :« The Shape of Punk to Come » voit le jour… Metallica, Rage Against The Machine, Slash et j’en passe saluent la prestation des Suédois persuadés d’avoir sorti l’album du siècle. Mais ils commettent deux erreurs : ils jouent beaucoup trop fort en live et ne se préoccupent pas de leur guitariste qui se sent mal. Résultat ? Tournée catastrophique, mésentente au sein du groupe, arrestation du groupe par la police au fond d’une cave puis l’inévitable split. En 2012 le groupe se reforme et réalise enfin la tournée de leur rêve.

En 2015 sort donc « Freedom » que je place ici en première place car pour la troisième fois, Refused prend tous les risques possibles et démontre le potentiel de l’héritage qu’ils ont laissé en 1998. Évidemment, ce Freedom bouscule les esprits à nouveau : la critique est mitigée mais le groupe ne s’en soucie plus et possède maintenant une expérience du live hors-norme (ceux qui les ont vus comprendront). Pour cet album, Refused prend tous les virages possible : Pop, Rap, Hardcore, Funk, Metal, Punk, puis le tout passe au broyeur du groupe… Depuis sa sortie, chaque écoute permet de mieux cerner l’alchimie entre les musiciens. En Live ? Comment oublier la claque qu’a pris le Trianon face à « Dawkins Christ » et  » Thought is Blood« ? Je n’avais jamais ressenti ça en live : la sensation de prendre un mur de son qui avance inexorablement vers moi comme une tempête de sable ou que sais-je : le mot puissant ne suffit pas.

Pour la production irréprochable, la violence des titres, l’engagement sans concession, le chant hurlé inimitable de Dennis, la volonté de repousser toujours plus loin les limites du genre qui n’en finit pas de s’entasser dans les clichés : Freedom se retrouve en première place de ce top.

#2 – Faith No More : Sol Invictus


Les Californiens et leur légendaire « Angel Dust » reviennent en 2015 avec leur son si unique sans nous faire l’offense de la soupe réchauffée du passé. On assiste à une sorte de mix des Beach Boys qui auraient rencontré les Siouxsie and the Banshees et passés leur son au programme de lavage : Black/Gothique métal. Mais, dans l’ensemble, le tout s’agence plus facilement qu’au sein de King For A Day Fool For A Liftime (3ème album avec Patton) où quatorze titres se suivent avec chacun leur propre style. Sol Invictus, je l’aurais bien positionné en première place mais je trouve la prestation des Suédois un cran au-dessus en matière de risque et de production. Sol Invictus vient donc balayer le public d’un crochet digne d’un Ramon Dekkers (RIP) en grande forme : aucun morceau n’est « prévisible », comprenez par là que si Maiden ou Slayer ne surprennent plus personne, c’est loin d’être le cas des cinq albums qui se retrouvent ici. Super Hero, deuxième single, est un véritable rouleau compresseur quand Motherfucker représente tout ce qu’est le groupe : provocation et diversité, fusion et intégrité ( on est très loin de la fusion que tout le monde s’imagine). Faith No More revient donc nous « choquer » avec son rock unique et sorti de leurs tripes avec un savoir-faire démontrant l’expérience du groupe sans jamais tomber dans la redite. Vous en apprendrez un peu plus à propos du groupe si vous lisez ma rétrospective « Pattonienne » sur le blog. En attendant vous pouvez vous essayez au live du groupe.

#3 – Killing Joke : Pylon

 Killing Joke, après trente-sept ans de musique sort Pylon,qui peut être perçu comme un résumé de la discographie du groupe. C’est un album de post-punk-métal-indus dont seul Killing Joke a le secret. Dernier épisode d’une trilogie commencé avec Absolute Dissent en 2010, Pylon vient fermer la parenthèse avec une pêche d’enfer. Un album qui mérite d’autant plus sa place ici vu l’ancienneté du groupe qui donne des lives toujours aussi efficaces comme au Hellfest. Les anglais ont  gardé leur inspiration en voyageant, parcourant le monde et puisant leur inventivité là où bon leur semble comme ces enregistrements à Prague en 2010. Épique, violent, engagé, puissant, ce nouvel opus d’un groupe immortel vous charmera au fil des écoutes. Et si, comme moi, vous découvrez le groupe en 2016… Vous risquez de ne pas vous en remettre…  Mais souvenez-vous : « ce qui ne nous tue pas… Nous rend plus… BIZARRE! » (Joker, Dark Knight)

#4 – Kendrick Lamar: To Pimp a Butterfly


Le nouvel album du rappeur originaire de Compton est une œuvre d’art travaillé à 300%, un classique façon Illmatic de Nas puisant son inspiration dans le Jazz, les Roots, Dr. Dre, Eazy E, OutKast et j’en passe. C’est l’album de Hip-Hop que j’attendais depuis… Depuis… Bref. 40 000 000 de vues pour le clip Alright, on est pas loin de la performance d’un Thriller de Michael Jackson (que Lamar imite sur King Kunta, 60 000 000 de vues). C’est tellement rare que commerce et art se réunissent aussi bien pour accoucher d’un projet de cette trempe! Ne vous arrêtez pas aux quelques billets exhibés ici et là, à l’attitude Gangsta , Kendrick sait d’où il vient et nous explique sa position dans la communauté qui l’inspire autant. Et la musique dans tout ça… Enorme, ça groove, c’est constitué de dizaines de détails ici et là, d’une inventivité jamais vu dans le hip-hop à ce jour (OutKast peut-être et leur Stankonia tout aussi hors-norme à l’époque) et en live me direz-vous? Remarquable et intense ! Kanye West n’avait qu’à bien se tenir! L’élève dépasse toujours le maître, avec le talent en plus.

#5 – Carpenter Brut : Trilogy

A l’origine du projet, un français fan de metal et de musique en tout genre. Son idée ? Mélanger Justice et Carpenter, chose qui engendrera ce Trilogy (compilation de tous ses morceaux) rempli de bonnes idées et au final dantesque, bien nommé « Invasion A.D.« . Sur scène: guitare, batterie et synthé sont de la partie. Le résultat est impressionnant, poussant un peu plus loin la porte déjà ouverte par Justice quelques années plus tôt avec son remix de Master of Puppets de Metallica. L’album a une ambiance très année 80 du coup (on s’en doutait) mais le compositeur a de la suite dans les idées et chaque morceau (à l’exception peut-être des tracks les plus cool, dansant) semble être pensés comme  un titre de Metallica : intro, développement, break, final, outro. Écoutez donc Invasion A.D. pour vous en convaincre. Si David Guetta pouvait s’en inspirait pour comprendre que l’electro ce n’est pas seulement trois notes pendant quarante cinq… Voici une œuvre aux accents des années 80 mais qui sonne résolument « 2015 ». Fan de Carpenter John ? De films d’horreur ? De metal ? D’ électro ? Tentez ce disque teinté de voix hantées, de riffs déchus et de samples cauchemardesques.

 Rendez-vous dans un an (avec Metallica ? Gojira ? Dorothée ?)

#6 – Le recalé à tort…

Je ne pouvais pas vous quitter sans parler de Dirty Shirt! En 2015, le groupe a joué la même carte que Sepultura en 1996, avec « The Roots » . Mais chez les Balkans, la musique est moins sombre, moins Death-Metal et moins orientée « néo-métal » pour les colleurs d’étiquettes. Après Freak Show, un album moins homogène, plus gras et lourd, plus néo-métal justement, c’est un retour aux origines Balakaniques qui nous est proposé par la bande. Enregistré avec le Transylvania Folklore Orchestra, cet album est une vraie source d’énergie positive : pendant trente-six minutes, les Roumains (sept gaillards) envoient leurs riffs et chant metalleux sur fond de violons, accordéons, etc. Le mélange fonctionne à merveille et chaque piste de ce chef d’oeuvre (je m’emballe un peu?) vous emportera dans les contrées de l’Europe de l’Est comme personne. « C’est la fête, c’est la folie ? » Yes ! Un album aussi beau que sombre, aussi enragé que festif. Chaque piste fourmille d’idées (que l’on retrouve déjà chez Bungle en 1999) et n’a pour seul but que de vous faire sauter dans tous les sens ! Dirty Shirt ne réinvente rien (en ayant toutefois  très bien digéré des influences que l’on devine sans mal : Bungle, Faith No More, Sepultura, Gojira, Slayer, Obituary entre autre) mais vous propose un mélange sauvagement dosé et enregistré/produit aux petits oignons ! Du néo-métal comme celui-ci, j’en mangerais bien tous les jours ! Vivement le prochain !


* Vous l’aurez deviné, la réponse est… non !

4 thoughts on “[Tops de l’été] Cinq parmi tant d’autres en 2015”

    1. Merci Lucius… on a quelques éléments en commun dans nos blablas sur 2015. En revanche, il faudrait que je redonne une chance au Refused qui ne m’avait a priori pas conquis de prime abord !

  1. Le Refused sort des sentiers battus, il ne sonne pas comme le public voudrait qu’il sonne mais comme ses auteurs le souhaitent. Il m’a fallu plusieurs écoute avant de sauter partout à son écoute. Ce que j’apprécie, c’est cette faculté à sortir des nouveaux morceaux hybrides sans perdre en violence ou en style : c’est du Refused à 300%. Et puis ils auraient pu sortir que des morceaux comme Elektra, ce qui aurait été facile pour eux (suffit d’écouter le deuxième album pour s’en rendre compte) mais décident de casser les barrières, et c’est ça fait du bien à un style (le punk et le hardcore) qui meurt à petit feu depuis sa création.

    J’attends leur prochain avec impatience!

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