[Feedback] À propos du JPS Labs Abyss AB-1266

Salut à toi l’ami(e),

Avant que tu ne commences à parcourir ce que je nomme une « brève (?!!) de comptoir », j’aimerais t’en toucher deux mots.

Si tu es désireux de trouver toutes les réponses à tes questions, une analyse approfondie, de la rigueur, le pourquoi du comment par A+B, des données techniques, des courbes de réponses fréquentielles, etcetera. Je vais être franc avec toi, ce qui suit a bien des chances de te laisser sur ta faim ou pire, de t’ennuyer ferme. Ne te méprends pas, ta démarche est on ne peut plus légitime et je la respecte. Mais pour ma part, un retour d’expérience, alias feedback, ne saurait être assimilable à un test.

Si tu te décides malgré tout à aller plus avant, garde à l’esprit que même si cette « brève de comptoir » prendra parfois des allures de test dans sa forme et son déroulement, elle n’en est donc absolument pas un, à l’instar de toutes celles que j’ai écrites dans ce lieu et ceux qui l’ont précédé. Elle est le reflet de ce que je suis depuis environ 11 ans et de ce que je suis attaché à demeurer : un amateur, un aficionado avec un peu beaucoup de subjectivité, avec son lot de questions sans réponses, aujourd’hui empreint de ces certitudes dont certaines n’en seront peut-être plus demain, mais toujours avec sa passion et sa sincérité.

Voilà, tu sais désormais ce qui t’attend, si j’ose dire. Le cas échéant, il ne me reste plus qu’à te souhaiter une bonne lecture. Dans le cas contraire, je te souhaite de trouver prochainement ton bonheur dans cette quête du casque idéal.

Isalula
Juillet 2016


Introduction

… Si ce n’est certes pas la première fois que je m’apprêtais à faire une nouvelle rencontre, sans me targuer le moins du monde d’être un fin connaisseur et encore moins un expert, j’avoue sans détour un sentiment où se mêlait à la fois la curiosité habituelle et aussi une certaine perplexité. Pour quelles raisons ?

Eh bien, parce que je n’ai pas souvenance qu’un casque ait suscité ce consensus quant à l’ensemble de ses qualités acoustiques, par l’écart, et non la nuance, parfois constaté vis-à-vis de modèles auréolés d’une solide renommée. Alors oui, je dois bien avouer que cela avait un côté troublant, particulièrement pour avoir su mesurer et apprécier au fil du temps l’expérience et la compétence détenues par certains des aficionados qui se sont essayés avant moi à l’Abyss.

Mais commençons par le commencement, puisque nous le voulons bien.

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Présentation

Si l’on pouvait légitimement s’attendre à voir des constructeurs s’intéresser d’un peu plus près à ce segment de marché que représente le casque Haute-Fidélité, je pense que l’on était tout de même peu préparé à voir émerger un modèle High-End basé sur une technologie datée, coûtant la bagatelle de plusieurs milliers de dollars, et, pour couronner le tout, qui s’avère être le fruit d’une marque jusqu’alors néophyte en matière de casque, en l’occurrence JPS Labs.

Bigre, à quasiment 5 500,00 $ la pièce au pays de l’Oncle Sam (muée en 6 000,00 € sitôt débarquée sur nos côtes), voilà un pari plutôt risqué pour une marque auparavant inconnue des aficionados du casque, et ce quelle qu’ait pu être la durée (5 ans ?) et l’attention portée à la conception de l’objet en question, je trouve.

Force est de déplorer que c’est le genre de positionnement tarifaire qui amènera moult auditeurs à rester bon gré mal gré sur la terre ferme, y compris en faisant abstraction des exigences de l’Abyss, premier du nom, en matière d’alimentation. Quoique, aux dires de plusieurs utilisateurs, son exigence s’avèrerait être en deçà de ce que sa faible sensibilité peut laisser à penser. Pour avoir possédé une paire de casques aux spécifications de cet acabit (AKG K340 et K1000), je nourrissais un certain scepticisme sur ce point, tout en n’ayant rien contre le fait de me fourvoyer, sachant que cela éviterait à certains propriétaires de l’Abyss de se saigner (de nouveau ?) à blanc afin de le sustenter convenablement.

Alimentation

Car, si certains aspects dans la conception de l’Abyss AB-1266 (AB pour Abyss, 12 pour l’année 2012 et 66 pour la taille en millimètres des drivers, dixit Joe SKUBINSKI, son concepteur) se démarqueraient plus ou moins des recettes éprouvées, ce casque planar magnétique (et non orthodynamique, toujours selon son créateur) ne diffère pas pour autant des caractéristiques électriques communes à cette catégorie, autrement dit une sensibilité allant de faible à moyenne, ainsi que d’une impédance du même ordre. Ce qui me paraissait signifier concrètement qu’un paquet d’amplis casque ne disposerait pas de l’alimentation adéquate afin d’être en capacité de relever pleinement le défi d’une sensibilité affichée de 85 dB ! Et donc seraient prédestinés à boire plus ou moins la tasse lors de cette tentative.

Plouf !!! Touché, coulé ! Comme quand on joue à la bataille navale. En clair ? C’est ce qui s’est produit, à ma grande surprise, en tentant d’associer l’Abyss avec mon ampli à tubes SinglePower Special Edition, lequel étant pourtant capable de piloter sans le moindre problème mon AKG K340, ainsi qu’une flopée d’autres casques, dont le K1000, selon l’un de ces anciens propriétaires. Pour ma part, seul l’AMT avait été jusqu’à aujourd’hui en mesure de le tenir en échec. Déroutant…

Un incident d’autant plus fâcheux qu’il rendra de facto caduque tout comparatif de l’Abyss entre différents amplis casque. Pire encore, il proscrira dans la foulée les quelques casques dépourvus de connectique symétrique que j’avais la possibilité d’emprunter, tant l’unique sortie asymétrique dont est doté le seul ampli restant en lice par la force des choses fait décidément pâle figure en comparaison de ses voisines de conception « balanced ».

Pour ne rien arranger, la ténébreuse entité électronique* dont je me suis attaché les services spécifiquement pour cette rencontre est vouée jusqu’aux tréfonds à motiver de gré ou de force des casques autrement plus énergivores que mon infortuné JVC HA-DX1000 Casques-Headphones Edition, seul casque à avoir survécu à ce naufrage. Un problème de couple qui se manifeste concrètement au travers d’un léger bruit de fond et d’une rotation du potentiomètre de volume fort limitée.

Tant pis, il me faudra donc partir à la découverte de l’Abyss avec les moyens du bord. C’est-à-dire à partir d’un système composé d’un lecteur CD Creek Evolution 2 utilisé en tant que drive, d’un convertisseur PS Audio NuWave câblé en symétrique vers un amplificateur Ray Samuels Audio Emmeline *The Dark Star, d’un (infortuné) JVC HA-DX1000 pour s’être vu (brièvement) livré en pâture à ce monstre, un panel d’albums issus de divers horizons musicaux (Loreena McKENNITT, Joe BONAMASSA, Mary GAUTHIER, Michel JONASZ, Kate BUSH, Angelo BRANDUARDI, Agnes OBEL, PINK FLOYD, Elliot GOLDENTHAL, etcetera) et enfin d’une paire d’oreilles en carton.

Primo, on le (oh) hisse…

Confort et construction

Comme je l’ai déjà mentionné par le passé, pesant n’est pas fatalement synonyme d’inconfort. Ce ne sont pas, du moins en ce qui me concerne, les Audeze LCD-2 et 3 testés de fraîche date qui le contredira. Mais qu’en est-il de l’Abyss, qui s’avère être, avec plus de 660 grammes affichés sur la balance, le casque (d’hommes ?!) le plus lourd avec lequel je me serais embringué à ce jour ?

Ma foi, le large bandeau d’arceau en cuir rembourré dont il est équipé remplit son office puisque le poids conséquent du casque ne se fera pas plus ressentir que ça, et ce même après avoir coiffé l’Abyss durant plus de trois heures d’affilée.

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Deuxio, on se cherche la posture idéale…

Le port de tête de l’Abyss pourrait, quant à lui, s’avérer plus rédhibitoire pour se démarquer nettement de ses rivaux, puisque les oreillettes à fixation magnétique en cuir de peau d’agneau, orientables au gré de la morphologie de l’auditeur, ne toucheront que partiellement le pavillon de l’oreille, et ce quel que soit le positionnement que l’on a opté pour l’orientation des écouteurs. Un dispositif qui m’évoque dans une moindre proportion celui équipant l’AKG K1000. Mitigé les premières heures, je m’y habituerais assez rapidement, avec le sentiment que si le degré de maintien et de stabilité habituel est irrémédiablement en deçà des modèles circum-auraux de facture classique, faute de pression d’arceau, le concept ne fut pas de nature à générer sur moi un réel facteur d’instabilité.

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Tertio, on fait le vide…

Que le casque soit doté d’une architecture ouverte ou non, est-il nécessaire de vous dire, avec un tel concept, d’abandonner tout espoir de pouvoir bénéficier de la moindre isolation phonique avec l’Abyss ? En effet, ce dernier et le K1000 me paraissent être ex aequo sur ce critère. Il faudra donc non seulement du temps devant soi, mais également du silence autour de soi pour s’immerger musicalement en compagnie de l’Abyss.

Si le design est « rudimentaire », j’y viendrais plus loin, la structure semble quasiment indestructible et l’assemblage n’appelle aucun reproche. Ce n’est pas seulement du très solide, c’est carrément du massif, au point qu’un Beyerdynamic fait un peu frêle comparativement.

Tant que j’y pense, l’Abyss a été fort conciliant envers le porteur de lunettes que je suis.

Packaging et esthétique

Si l’Abyss est loin d’être livré sans attributs, je ne cache pas que la fourniture en série d’une paire d’oreillettes supplémentaire n’aurait pas été incongrue au regard du tarif de base où il se situe. D’autant qu’en ce qui concerne l’Abyss, le système de fixation de type magnétique qui singularise ses oreillettes ne permettra sans doute pas la moindre alternative quant à leur remplacement.

Ne voyez aucun parti pris dans ce qui précède, car j’aurais émis exactement la même observation dans un compte-rendu dédié au Stax SR-009. À ce niveau de prix, je ne transige pas.

Il en est de même pour ce qui concerne la durée de garantie octroyée par JPS Labs, laquelle était de seulement un an, tout comme chez Stax sauf erreur de ma part. Alors, soit, nous bénéficions en tant que citoyen européen d’une durée légale de deux ans ; pour autant regretter qu’une garantie de cinq ans ne soit pas de l’initiative du constructeur pourrait-il sembler excessif ?

Tout est bien qui finit assez bien sur ce point puisque le constructeur octroiera une durée de garantie de 3 ans, à condition d’être le premier propriétaire, d’avoir acquis l’Abyss via un point de vente homologué et de s’être enregistré dans un délai de 90 jours à compter de la date d’achat sur le site abyss-headphones.com.

Quid des attributs, justement ? Car, il y en a bien plus que d’ordinaire, alors, parlons-en un peu.

On y trouve tout d’abord un coffret en bois, serti intérieurement de feutrine noire. Le couvercle est de couleur vert turquoise, avec le logo Abyss superposé en lettres grises. À l’intérieur, une sacoche de cuir noir abrite le casque ainsi que les oreillettes, le tout étant logé dans des compartiments alvéolés. Un étui en carton HeadStand contient un pied en aluminium à monter soi-même. On trouve ensuite les différents câbles flexibles gainés de noir, à la finition exemplaire. Ceux-ci se décomposent en trois paires, dont deux sont des adaptateurs (2 XLR femelles vers 1 XLR mâle à 4 broches, 2 XLR femelles vers 1 Jack mâle 6,35 mm) le troisième d’une longueur d’environ 2,50 mètres est monté en XLR 3 broches mâle côté ampli et mini-XLR mâle côté casque. Tous ont été conçus, manufacturés par JPS Labs et sont montés sur des fiches Neutrik, à l’exception peut-être des mini-XLR, dotés d’un ergot de verrouillage et destinés à être connectés aux écouteurs de l’Abyss. On est donc purement et simplement équipé d’emblée pour connecter l’Abyss sur la totalité des amplis casque compatibles.

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D’un point de vue pratique, trois câbles dédiés n’auraient certes pas été malvenus. Mais lorsque l’on sait le prix prohibitif du câble équipant l’Abyss (1 000,00 ou 1 500,00 $ ?) cela ne s’avère- t-il pas l’option la plus raisonnable du point de vue pécuniaire ?

Ma foi, étant donné la sensibilité du casque, pourquoi ne pas proposer en option un boîtier faisant office d’adaptateur d’impédance, à l’instar de celui dédié à l’AMT par exemple ? Un dispositif qui permettrait de l’associer à un amplificateur classique pour ceux qui le souhaitent.

Je ne me déroberais donc pas plus longtemps pour ce qui a trait à son aspect. Effectivement, même en faisant preuve d’indulgence, je confesse sans détour que je n’arriverais pas à trouver l’espace d’un instant le moindre attrait visuel à l’Abyss AB-1266. J’en conclurais donc sans hésitation ni regret que les goûts du ou des designers pour un look mêlant l’industriel au gothique s’avèrent irrémédiablement aux antipodes des miens, et cela même en faisant abstraction de mes penchants pour la « boiserie » (Audio-Technica, Audeze ou JVC). Mais comme je le pense et l’ai écrit à plusieurs reprises, un casque s’apprécie à l’écoute, pas à la vue. Et l’écoute, justement, on y vient.

Le son

… C’est donc en compagnie de Loreena McKENNITT et de the visit que j’entame cette exploration de l’Abyss, et si l’extrait que je choisis en guise d’ouverture ne dure qu’une poignée de minutes, il ne me faudra pas davantage de temps pour appréhender et admettre que la perspective sonore que l’Abyss déploie dans l’espace remet « à plat » celle de tous les casques que j’ai eu l’opportunité d’entendre par le passé, à l’exception du K1000 et à la condition de considérer l’AKG comme un casque à part entière, ce qui n’est pas tout à fait mon cas. Quant à mon HA-DX1000, mieux vaudrait ne pas en parler, tant il me paraît subitement congestionné. HD800, T1, PS1000… Aussi talentueux soient-ils, aucun ne me paraît en capacité de m’offrir le champ sonore tel que l’Abyss le dessine présentement devant moi. Le chant de la diva s’élève, se déploie sans se voir réfréné dans ses envolées, sans dureté, ni distorsion, mais avec un éclat, une subtilité et une ferveur renouvelée. Les instruments qui l’entourent sont parfaitement détourés et s’expriment en s’affranchissant insolemment de la limite inhérente aux écouteurs. La transparence qu’il instaure permet de s’imprégner sans effort de la solennité ambiante et de goûter à la multitude des fluctuations vocales et instrumentales qui parsèment cette ballade d’influence multiculturelle. Alors, si je n’ai tout de même pas eu la bouche grande ouverte par la stupeur en reposant l’Abyss pour la première fois sur le comptoir, je ne vous cache pas qu’elle s’est tout même légèrement entre-ouverte d’étonnement.

Puis, c’est au tour de Mary GAUTHIER avec dixie kitchen d’entrer en scène et à l’Abyss de me faire comprendre pour la seconde fois que ce n’est pas par la coloration ou la rondeur qu’il aspire à se faire apprécier, mais par sa sobriété, son homogénéité et son énergie tellement communicative. Et si ce sera la première fois durant cette brève de comptoir que je me ferais cette remarque in petto « Il a beau la jouer sobre, on ne s’ennuie vraiment pas. ». Ce ne sera pas la dernière, croyez-moi.

Cette fois, je ne me contenterais pas de me régaler avec un seul morceau, mais bel et bien d’une bonne grosse part de l’album. D’accord, d’accord, je comprends tout à fait que prétendre à propos de l’Abyss qu’il insuffle forme et vie pourrait sembler excessif. Et pourtant, il y a une telle densité dans sa manière de restituer voix et instruments, de les incarner à ce point en distillant la fermeté qui convient. La représentation est ample, mais n’en est pas moins cohérente en matière de proportion. Les instruments ne se dispersent pas de façon erratique dans un espace à la dimension encore nouvelle pour moi, mais prennent chacun leur place et s’y tiennent. Je dodeline doucement de la tête, le pied droit suit le mouvement, le tempo est là et bien là. De nouveau, l’Abyss me fait plonger tête la première dans l’ambiance. Que faire d’autre, si ce n’est se laisser bercer au son de guitares langoureuses et d’histoires que la conteuse nous confie d’une voix habitée par tant de conviction. Atmosphère palpable, expressivité des instruments, émotivité de la voix, Il ne manquera rien à mon bonheur. La définition de la musicalité telle que Joe SKUBINSKI l’a conçue à travers l’Abyss me va, jusqu’à présent du moins, à ravir. Au point que ça tourne à la débâcle pour mon HA-DX1000, la fraîcheur et non la froideur de l’Abyss l’emportant sans coup férir sur la chaleur désormais étouffante émanant du JVC.

Les choses se gâteront tout de même un temps en compagnie du quatrième opus des DIRE STRAITS love over gold, révélateur d’une certaine exigence de l’Abyss quant à la qualité des enregistrements, à l’instar du Stax SR-009, écouté pour la seconde fois l’été dernier et qui prend de plus en plus des allures d’alternative vis-à-vis de l’Abyss. Mais, pour l’heure, maintenons donc le cap vers ce dernier.

De facto, l’écoute sera suffisamment frustrante en regard de celles qui précèdent pour que je jette rapidement mon dévolu sur l’album qui s’ensuivit brothers in arms en l’occurrence, avec tout de même deux acquits. À savoir, la formidable vitalité que l’Abyss est susceptible de libérer, me rappelant au bon souvenir de l’Edition9 au gré de certains passages, et de sa capacité d’ouverture qui classe sans ambiguïté l’Abyss parmi les meilleurs.

Si l’écoute de why worry me conforte, si besoin est, sur l’ampleur, la transparence et la sobriété des timbres dont l’Abyss sait faire preuve, il va m’en remontrer par ailleurs en me dévoilant sans fard le relief qu’il est en mesure d’édifier. Et cela, sans qu’il s’effectue au détriment de la présentation, car on jouit à la fois d’un certain recul et d’une belle profondeur. Seuls les Audeze LCD-2, LCD-3 et AKG K1000 pourraient, dans mon souvenir, être susceptibles d’offrir un relief plus ou moins approchant. Encore une fois, il est bien difficile de ne pas tomber rapidement sous le charme du modulé des guitares, de l’écho des notes et des paroles qui se perpétuent sans contrainte comme autant d’évidences, des impacts nets, sans sécheresse et sans bavure de la batterie, de la palette des timbres – dont il fait un excellent usage –, de son grand sens du détail et enfin de sa spatialisation.

Comme je l’écrivais à dub, il y a peu de temps :

Faut reconnaître que c’est un casque d’homme… Y’aurait pas de la pomme dedans ?… En tout cas, de la pêche, ça, y’en a !

Ce à quoi, l’ami dub me répondit fort à propos :

Tu as raison : il y a de la pomme dedans, d’ailleurs, on a arrêté d’en faire, les clients se plaignaient, y’en avait qui devenaient sourds !

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Le Joe (ni celui de l’alambic, ni le papa de l’Abyss, mais le dénommé BONAMASSA), quand il pousse la manette des gaz à fond, je ne suis pas trop client. Mais il me fallait bien en passer par là, avec son live from nowhere in particular, histoire de jauger ce que l’Abyss avait sous le capot. On va la faire courte. Ceux qui sont en quête d’un casque doté d’un registre grave faisant preuve tout autant d’extension, de texture que d’impact, tâtez donc de l’Abyss. Ça relève purement et simplement de l’inédit en ce qui me concerne. L’assise qu’il possède dans le bas du spectre est absolument impressionnante. Il va encaisser sans broncher, tout ce que Joe et ses musicos pourront lui asséner. Alimenté comme il se doit, vous pourrez rayer de votre dico les termes lourdeur, trainage et autres flou. Est-il utile de vous confirmer qu’aucune distorsion, aucune saturation hormis celles qui sont préméditées ne se manifesteront intempestivement, mes oreilles ayant demandé et obtenu grâce bien avant que l’Abyss ne soit amené accidentellement à en produire, si tant est qu’il le fasse. Autre tour de force, l’absence d’effet de masque. Ici encore, l’Abyss apportera une dimension physique peu commune tout en ne sacrifiant rien quant à la transparence et à l’équilibre.

J’ai pu lire régulièrement qu’un casque d’architecture fermée était, par nature, plus à même de délivrer un grave possédant corps et impact. J’étais assez d’accord avec cette opinion jusqu’à ma rencontre avec les Audeze LCD-2 et 3 qui, malgré leur architecture ouverte, avaient sérieusement remis la chose en question. Avec l’Abyss, et en dépit de la conception ouverte de ses écouteurs, la question ne se pose plus en ce qui me concerne. Et ce n’est pas mon HA-DX1000 au grave plus écourté (?!!!) plus flouté, et plus comprimé qui contredira ce constat, malgré la modification que Pierre avait apportée à mon exemplaire en changeant ses coques, ce qui avait amélioré la consistance et la précision de son registre grave.

Face à l’Abyss, je pense que seul le LCD-3, à ma connaissance, me paraît être susceptible de tenter, je dis bien tenter, de se maintenir sur le ring.

Je n’en ai pas fini pour autant avec Joe et ses hommes, car cet album live issu de nulle part en particulier, comporte quelques pépites, à l’instar de sloe gin avec lequel l’Abyss démontre qu’il sait faire autant preuve de sensibilité qu’il sait faire assaut de fureur. Tout commence par un clavier au pépiement sentencieux suivi d’une guitare aux accords sensuels, dont le monologue mélancolique errera ensuite vers des accents empreints d’une rageuse désespérance, appuyés par une batterie prodiguant sans confusion ses coups de boutoirs délicieusement tendus et définis, pour achever ce monologue par une ultime clameur résignée… Avec toute cette conviction qui transparait dans les intonations, les mots, les notes et les accords, l’Abyss ne se contentera pas de m’émouvoir pour cette fois, il me bouleversera.

A la question suivante : l’Abyss aurait-il remis encore une ou plusieurs de vos certitudes en question ? Je réponds oui, Votre Honneur !

En effet, l’Abyss s’avère être extrêmement spontané par la franchise de ses attaques et par sa maitrise face aux écarts de niveau, à fortiori pour un casque affublé d’une pareille sensibilité. Il fait preuve d’une réactivité, d’une dynamique telle que ni l’AKG K340, ni le K1000, en bref, aucun des casques de faible sensibilité que j’ai possédés ou rencontrés ne m’y avait préparé, en dépit d’une solide amplification. C’est bien simple, j’avais tout bonnement l’impression d’avoir récupéré un Grado RS-1 en écoutant l’intro de des vies du trio FREDERICKS & GOLDMAN & JONES. Il faut l’entendre pour le croire, ce casque peut en un instant se transformer en un véritable foudre de guerre, en une formidable bête de scène.

Si l’Abyss ne saurait être considéré comme le casque de tous les superlatifs, lequel pourrait s’en vanter d’ailleurs ? Il n’en demeure pas moins qu’il serait assuré de figurer en bonne place si un tel podium venait à surgir de terre. Il m’a amené également à réviser mon opinion quant à la moindre polyvalence que j’attribuais davantage envers les flagships, que vis-à-vis de certains casques situés dans des gammes plus classiques. Alors, si je continue à considérer volontiers le K1000 et le HD800 en tant que tels, l’Abyss m’a démontré avec maestria qu’il était le casque (de l’expérience que j’en ai faite) de toutes les situations. Mais pas de tous les enregistrements, et ce même s’il se sera révélé un tantinet moins intransigeant, moins crispant que certains de ses pairs dans le haut-médium, une zone de fréquences vis-à-vis de laquelle je suis dorénavant plus sensible. Pour autant, dire de lui qu’il possède une signature en v majuscule me paraît excessif, en dépit de ce que certaines courbes pourraient laisser supposer. Mais je laisse sans regret ni remord cette question entre les mains et les oreilles des spécialistes, étant pour ma part peu friand de courbes, à l’exception notable de certaines qui n’ont définitivement rien en commun avec ce qui nous passionne ici.

Si l’Abyss se révèle extrêmement démonstratif, c’est par sa propre définition de la musicalité, son énergie, son ampleur, son assise et sa versatilité. Autrement exprimé, par le pan d’âme qu’il révèle, la conviction qu’il instille et la ferveur qu’il prodigue. Après tout, quoi de mieux que le reflet d’une absolue et bienheureuse subjectivité pour parachever ce nouveau chapitre de mon livre d’histoires ?…

J’en terminerais (enfin !!! S’exclamèrent-ils à l’unisson) avec une pensée émue (Il est bien vrai, ce mensonge ?) envers celles et ceux qui s’aventureront à explorer l’Abyss, tant je suis intimement convaincu que bien peu d’entre eux, avec l’équipement adéquat, en reviendront sains et saufs.


Merci de ta confiance, Pierre, pour m’avoir offert l’opportunité de réaliser en compagnie de l’Abyss l’une des plus belles étapes qui jalonnent et, j’en suis convaincu, jalonneront toujours mon parcours !


3 thoughts on “[Feedback] À propos du JPS Labs Abyss AB-1266”

  1. Je pleure … Je pleure de ne pas avoir les moyens de vivre une telle expérience ;_; … Ton feedback inspire vraiment du rêve. Un grand merci pour cette plaisante lecture.

  2. Ouf, Isalula, tu nous donnes soif…d’entendre…
    Heureusement les premières lignes quant à l’ampli mettent à sec illico qui se perdrait…
    Toujours aussi plaisant à lire…Évocateur…
    Merci

  3. Merci pour ton retour d’expérience fort bien décrit et qui donne franchement envie de le poser un moment sur mes oreilles ! notamment ces graves dont tu parles !
    Mais je crois que je ferai cela à la rentrée.
    Mais il y a aussi le SR009 que j’aimerai écouter attentivement….

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