[TEST] Focal Spirit Classic et professional : Pourquoi dépenser plus ?

Les Focal Spirit Professionnal et Classic ne sont plus à proprement parler des nouveautés mais ça n’empêchait Tellementnomade.org d’avoir un oeil intéressé sur la carrière des deux casques qui ne semblaient pas jusqu’ici avoir la faveur des amateurs français. Hé bien ces derniers feraient bien de lire la suite…

Ne nous le cachons pas, nous étions assez impatients de mettre en test les Focal Spirit Classic et Pro. En effet, le Spirit One, bien connu des amateurs de casques nomades, a déjà une longue carrière derrière lui et force est de reconnaître que Focal a réussi un coup magistral en créant ex nihilo un casque audio et en le positionnant rapidement sur les étals des grandes enseignes du secteur. C’est d’autant plus méritoire que si Focal est expérimenté et internationalement reconnu pour ses enceintes HIFI et professionnelles, le casque audio était un secteur sur lequel la marque stéphanoise partait d’une page blanche.

Néanmoins, tout n’étant pas rose au royaume du Danemark, quelques soucis récurrents ont entaché la carrière du jeune Spirit One. D’un point de vue son, le Focal Spirit One s’est certes assuré les éloges de la presse spécialisée et des retours positifs des acheteurs – dont votre serviteur –  sans toutefois s’assurer une place de référence incontestée comme par exemple les Sennheiser Amperior ou Momentum. Les retours effectués par les utilisateurs du Spirit One sur le forum Tellementnomade.org et ailleurs attestaient par ailleurs de l’existence de problèmes récurrents. On note en particulier des problèmes de fiabilité pour le moins aléatoire avec des ruptures ou des dégradations du bandeau du casque (dégradation des rotules, fissuration des assemblages…). Le SAV Focal et sa communication autour du sujet se sont d’ailleurs avérés remarquables, mais il n’en reste pas moins que sur les déclinaisons à vocations sédentaire et professionnelle de son modèle phare, la marque était attendue au tournant.

Il est l’heure de déballer le matériel.

 

Focal_PRO_en_boîte

 

Déballage et premier coup d’oeil.

Les deux casques nous apparaissent solidement enchâssés dans une boîte cartonnée de bonne facture. Un petit étui cartonné enferme une documentation soignée. On est certes pas dans les ors et les velours du haut de gamme mais néanmoins le tout semble conforme au prix demandé. Au niveau accessoire, on note la présence de deux câbles. Le premier, à vocation nomade, est doté d’un micro permettant l’utilisation du casque avec un smartphone. En sus, le Focal Spirit Classic est doté d’un câble long de bonne facture en jack 6,35mm tandis que le Spirit Pro est lui livré avec un câble hélicoïdal de 4m toujours en Jack 6,35 ; les vocations sédentaire et professionnelle des deux casques justifient cette différence.

 

Focal Spirit Classic au déballage
Focal Spirit Classic au déballage

 

Au niveau look & feel, les différences entre les deux modèles sont nettes. Couleur à dominante marron cuir pour le Spirit Classic et finition noire à goutte d’eau pour le Focal Pro. Salon versus studio, sédentaire versus professionnel. Je crois qu’on a compris les destinations respectives des deux casques. Le Classic utilise plus de Simili Cuir pour son bandeau ce qui renforce son aspect « cosy ».

 

Focal Spirit Professional: La finition Noire "Goutte d'eau"
Focal Spirit Professional: La finition Noire « Goutte d’eau »

Évidemment, à ce stade de la découverte, les fissures et les craquements du Focal Spirit One nous reviennent vite en mémoire et on scrute très vite les zones à problèmes sur nos deux nouveautés. Force est de constater que Focal semble avoir retenu les leçons des avaries du Spirit One et que la conception du Classic et du Pro apparaît immédiatement plus sérieuse. Les rotules des écouteurs semblent bien plus solides, aidées en cela par le fait que ces derniers disposent d’un rayon de rotation bien plus réduit que sur le Spirit One. Ceci a pour conséquence d’empêcher l’alignement des écouteurs sur le même axe que le bandeau et donc de ranger les casques « à plat ». Un mauvais point pour le nomadisme donc, mais ce n’est pas la vocation première du matériel testé ici.

 

Focal_Classic_Rotule
Focal Spirit Classic: une conception nettement renforcée.

 

Très bonnes premières impressions donc et il est temps de poser les casques sur nos oreilles.

Et sur la tête ça donne quoi ?

On constate très vite une deuxième amélioration fondamentale par rapport au Spirit One : les coussinets offrent plus de place pour nos oreilles. En effet Focal a augmenté les dimensions internes des « cups » de 7mm et ça se sent à l’usage. Attention tout de même, autant le Classic que le Pro offrent un espace qui reste restreint et les possesseurs de larges oreilles peuvent ressentir des problèmes de confort. Les pads sont eux conformes à ce qu’on a sur le Focal Spirit One : fermes mais confortables – de mon point de vue.

 

 

Focal Spirit Classic
Focal Spirit Classic

 

Les écouteurs sont bien plaqués sur les oreilles et le casque offre un port globalement ferme. En usage pro, cela semble un gros point fort puisque le casque restera bien en place sur la tête du musicien en plein exercice de son art. En usage sédentaire, ce sera affaire de goût. Personnellement j’aime quand un casque fermé isole et qu’il ne bouge pas : un « clamping » ferme me convient donc parfaitement mais certains utilisateurs y trouveront peut-être moins leur compte. En tout état de cause, je ne pense pas que les deux Focal puissent être considérés comme les rois du confort.

Le port ferme et les pads bien positionnés sur les oreilles laissent présager d’un excellent niveau d’isolation. C’est un impératif majeur pour un usage studio dans des conditions d’enregistrements où toute « repisse » doit être évitée et c’est bien sur un intérêt important pour qui veut profiter chez soi de sa musique sans gêner (ou être gêné par) l’entourage.

Il est temps de brancher les casques et d’envoyer le son.

 

Envoyez le son:  » ah oui quand même… ça vaut combien déjà? »

Effectivement, on peut confirmer que l’isolation des deux casques est excellente. Elle n’est à mon avis pas aussi parfaite que mon Ultrasone Signature pro – qui est impressionnant de ce point de vue – mais à n’en point douter vous pourrez profiter de votre musique à tout volume et en toute tranquillité. On n’en attendait pas moins de deux casques fermés, mais encore fallait-il le confirmer.

Du coup, on peut profiter rapidement des qualités des casques. Et quelles qualités !

On a donc pu mettre en œuvre les Focal Spirit Pro et Classic sur les sorties casques d’un smartphone, d’un ordinateur portable, d’un Fiio E17 et d’un système casque sédentaire « Hi-end » destiné au Sennheiser HD800. Les deux casques ont donc pu être comparés avec le HD800 en question, un Ultrasone Signature pro et un NAD HP-50 gentiment prêté par membre de la communauté TN.

Sincèrement, les premières écoutes du Spirit Classic sont bluffantes. Les premières sensations qui viennent à l’esprit sont équilibre, cohérence et qualité de détail et très vite on pense au tarif d’achat très raisonnable des deux casques. Assurément, Focal offre avec le Classic et le Pro un son qui vaut bien plus que le prix de vente affiché (autour de 250€) .

Quelle que soit la musique écoutée, le son des deux casques offre les mêmes qualités. Aucun point de la balance tonale ne semble prendre le pas sur les autres. Pas de basses envahissantes ou anémiques, pas de coloration ou de creux dans le médium, pas de brillance excessive dans l’aigu ni à contrario de sensation de casque « bouché ». La signature ne semble ni montante ni descendante. Tout est à sa place, soigneusement déployé dans un espace cohérent. En effet, au niveau scène sonore – ou soundstage – là encore c’est la sensation d’équilibre qui domine. Fort heureusement, on ne ressent pas trop le côté cloisonné habituel d’un casque fermé. On est bien sûr loin de ce que produit un excellent casque ouvert mais les deux Focal rendent sur ce point une copie de bonne facture. De prime abord, on a un peu de mal d’ailleurs à différencier les deux casques, qui semblent présenter la même absence de défaut.

On pourrait craindre que ce côté très propre entraîne un ennui à l’écoute mais non. Outre la grande propreté du rendu, on est vite charmé par un son vivant et dynamique, avec un excellent niveau de résolution et de détail. L’ensemble fait qu’on perd très vite l’envie d’analyser ou disséquer l’écoute pour simplement profiter de sa musique.

Passé le moment d’étonnement de la découverte d’un rendu aussi bon – surtout compte tenu du prix -, on cherche quand même à creuser un peu plus attentivement, ne serait-ce que pour distinguer les différences éventuelles entre les deux modèles, mais on se prend au jeu des comparaisons entre nos deux Focal et des modèles plus huppés – et surtout plus chers – comme par exemple l’Ultrasone Signature pro, lui aussi fermé et à vocation à la fois semi-nomade et professionnelle.

Le "Bundle" du Spirit Pro
Le « Bundle » du Spirit Pro

 

Et en creusant un peu, ça donne quoi?

Graves : Il faut créditer les deux casques d’un excellent point : le sous-grave est bien présent, lisible et articulé. Certes, la conception fermée aide sur ce point mais voir traité ce registre de manière aussi propre dans un casque de ce prix est finalement assez rare. Pour les basses et particulièrement les mid bass (100hz), qui donnent souvent le facteur fun au casque mais aussi trop souvent une coloration excessive, on ne note ici pas d’excès nuisible à la signature équilibrée et neutre du casque, ni de débordement de ce registre sur le reste du spectre. En un mot, les basses sont tenues, précises et ne perdent jamais en lisibilité même quand la vitesse augmente. Dans le haut grave/bas médium, on note une différence entre le Professsional et le Classic. Ce dernier en effet est notablement plus généreux et offre du coup une chaleur supplémentaire qui a tendance, en contrepartie, à amenuiser la lisibilité du registre grave. À titre personnel, je préfère le registre grave plus sec et plus tenu du Spirit Professional mais ceci est réellement une affaire de goût et de styles musicaux. En tout état de cause les deux casques proposent une copie d’excellent niveau. L’Ultrasone Signature pro, certes beaucoup plus cher, offre un grave plus rapide et plus riche en matière, plus organique. Le kick de grosse caisse résonne plus « vrai », La basse de Marcus Miller plus dense, avec plus d’impact. Le NAD HP50 lui va plutôt se rapprocher du Focal Classic avec un haut grave plus fourni et donc un registre grave plus « romantique », moins précis, moins net. Les 4 casques livrent des prestations d’excellente qualité bien sûr et « downgrader » du Signature pro aux Focal par exemple ne provoque aucun choc déplaisant, preuve s’il en est de la qualité des deux casques.

Médiums : A l’instar de certains Beyerdynamic, les casques Focal offrent un médium très neutre. Pas de mise en avant flatteuse et pas de creux comme l’Ultrasone. Le registre médium semble juste, bien à sa place. Classic et Professional sont d’ailleurs un peu différents. Dans la continuité du haut grave, le bas-médium du Classic est en effet légèrement plus opulent que celui du Professional, contribuant une fois de plus à cette légère coloration chaude du Classic. À l’opposé, le Spirit Pro offre un haut-médium un peu plus présent. Les légères différences dans la présentation de ce registre positionnent les deux casques dans deux « camps » plutôt logiques compte tenu de leur positionnement marketing. Le Classic propose globalement une écoute plus chaleureuse et relax, alors que le Spirit Pro aura tendance à projeter un peu plus la musique, donnant une impression de détail et d’immersion plus grande. L’amateur d’éclat, de détail et de signature plus sèche optera pour le Spirit Pro. L’amoureux de rondeur et de chaleur préférera probablement le Spirit Classic. A titre personnel, la signature du Focal Spirit Professional a ma préférence.

Aigus : Si j’avais à identifier un point un peu moins bons que les autres, je dirais que c’est au niveau des aigus que je le ressens le plus. Ils semblent manquer d’un peu de finesse et de définition mais aussi d’éclat. Au premier abord en tous cas, les deux focal ne semblent montrer ni déficit ni excédent en matière d’aigus. C’est juste que les attaques montrent un peu de dureté, manquent un tantinet de finesse. Les violons peuvent avoir tendance à pencher légèrement du côté criard de la force. Évidemment, on pinaille ici et je rappelle que mes écoutes habituelles sont réalisées sur un Sennheiser HD800. Il se peut que je sois un peu injuste et en tous cas, l’aigu des Focal n’est jamais fatiguant. Ceci dit, même par rapport à l’Ultrasone qui n’a pas l’aigu le plus raffiné de la production mondiale, les deux Focal offrent un aigu certes moins métallique mais aussi bien moins détaillé. C’est évidemment une affaire de balance tonale plus descendante pour le Classic et le Professional que pour l’Ultrasone mais il reste quand même que leur aigu impressionne moins que les graves et les médiums et contribue à un ressenti général de manque de caractère peut-être? Le registre reste très bien traité de manière globale bien sûr mais on tient ici peut-être un des quelques défauts des deux casques à mon goût.

Soundstage : L’impression laissée par les deux casques est légèrement mais assurément différente. Le Spirit Classic présente la musique de manière légèrement plus distanciée mais aussi avec peut-être une peu plus d’ampleur,  tandis que le Spirit Pro propose un soundstage peut-être plus frontal et plus dense. Il me semble pour le coup que le Classic est sur ce point supérieur au Professional. On retrouve là aussi à mon avis des qualités en accord avec les vocations des casques. La signature légèrement plus dark et plus chaude du Spirit Classic s’accompagne d’une présentation plus aérée et plus relax, pour faire savourer l’écoute au mélomane tandis que le Spirit pro capitalise sur sa signature sèche et orientée « détail » et y adjoint un soundstage plus frontal pour capter et concentrer l’auditeur en vue d’une écoute plus attentive, analytique.  La différence reste subtile mais me semble évidente. Reste que sur ce point du soundstage, les deux Focal ne me semblent pas aussi flamboyants que sur d’autres items. La largeur est très correcte pour des casques fermés. Le point qui pèche ici se situe plutôt du côté de la profondeur et de l’étagement des plans. Le Spirit Pro du fait de sa frontalité plus grande offre peu de lisibilité de ce point de vue. Le Classic offre certes plus de distance et donc d’ampleur mais sans en offrir beaucoup plus en terme de profondeur. Le Signature pro fait sans aucun doute mieux et si on pense par exemple à la présentation exemplaire d’un Beyerdynamic DT880 – pour prendre un exemple de casque de même gamme tarifaire – , on se prend à espérer de Focal un progrès pour les futures itérations de ses casques.  A l’écoute, cela se traduit tout simplement par un léger manque d’immersion et de réalité.  Bien sûr, cela ne suffit pas à noircir le tableau et ces petites faiblesses ne nuisent en rien au plaisir d’écoute.

Mesures: (source innerfidelity)

 

Conclusion:

Focal Spirit Pro
Focal Spirit Pro

 

La question qui n’arrive pas à sortir de l’esprit lorsque l’on met ces casques en écoute c’est incontestablement « mais pourquoi dépenser plus? ». De mon point de vue (et je ne crois pas être le seul à le penser), Focal met franchement la barre haute avec le Spirit Classic et le Spirit pro. Si on exclut le Fostex TH900 – à mon avis très spécifique du fait de son rendu et du manque d’isolation le rapprochant beaucoup d’un casque ouvert -, je pense sincèrement que les Focal n’ont pas à rougir face à la concurrence, quelle que soit la plage tarifaire considérée. On a pu le voir au travers de comparaison avec l’Ultrasone Signature pro – tarifé à presque 900€ rappelons le -. Certes, ce dernier va offrir une expérience audio plus intense mais va aussi montrer quelques défauts que n’ont pas les Focal.

Mais du coup, quel Focal Choisir ? Classic ou Professional ? De mon point de vue, les deux sont proches et ne peuvent en aucun cas être un mauvais choix. L’audiophile aura intérêt à jeter une oreille attentive et choisir le modèle convenant le plus à ses goûts personnels. Cela lui donnera en outre l’occasion de se faire sa propre opinion sur un confort qui ne plaira sans doute pas à tous. Il y a fort à parier toutefois que l’amateur expérimenté ayant déjà une idée précise de ses goûts trouve les Focal un peu « sages » et manquant peut-être d’une personnalité plus affirmée. A titre personnel, j’avoue que le Focal Spirit professional serait sans aucun doute mon choix prioritaire si j’avais à racheter un casque fermé en complément de mon HD800.

En ce qui concerne les « pro », j’avoue ne pas maîtriser les exigences d’un musicien ou d’un technicien du son mais pour avoir testé d’autres casques à vocation professionnelle bien connus en studio comme l’AKG K240 ou le Beyerdynamic DT770, je pense sincèrement que la fidélité et la qualité du rendu d’un Focal Spirit Pro est très largement supérieure. Pour autant l’usage studio d’un casque est bien souvent éprouvant pour la solidité du matériel. Si les deux casques démontrent des progrès visibles en terme de qualité de construction, je pense que l’on reste assez loin de caractère quasi indestructible d’un DT770 ou d’un HD25. Seul l’usage pourra nous dire si le plumage des Focal est à la hauteur de leur ramage.

 

Note finale :  5/5

La qualité sonore des deux casques et surtout le rapport qualité/prix exceptionnel justifient la note maximale. Les doutes quant à la fiabilité de la construction et un confort qui ne plaira  pas à tous  ne doivent pour autant pas être oubliés. Comme d’habitude nous conseillons chaudement de faire un essai de ces casques avant achat. 

 

Si vous souhaitez discuter de ce test et/ou poser des questions, c’est ici que ça se passe.

 

 

Galerie (Crédit Photo: Ony) :

 

6 thoughts on “[TEST] Focal Spirit Classic et professional : Pourquoi dépenser plus ?”

  1. Pingback: [Brèves] Marty Mc Fly #20 | TellementNomade

  2. Pingback: [Brèves] Marty Mc Fly #20 - News | TellementNomade

  3. Je voulais juste survoler ce test pour recueillir quelques renseignements sur le Professional et j’ai été happé par la prose à la fois limpide et précise de sieur Sorrodje…
    Grâce à ce beau texte, j’ai l’impression d' »entendre » ces casques sans pourtant les avoir écoutés.
    Beau boulot. Merci beaucoup.

  4. Merci beaucoup pour ce test très agréable à lire, Focal est une marque française connue et respectée en Hi-fi, et elle en prend le chemin sur le marché des casques avec ces deux modèles. J’espère qu’ils vont se lâcher et nous sortir des plus haut de gamme.

  5. Pingback: [TEST] Ultrasone Performance 840,860 et 880 | TellementNomade

Leave a Comment

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *