[Test] SM64 : la force tranquille

EarSonics nous a permis de tester pendant quelques semaines son nouvel universel 3 voies / 3 transducteurs, le SM64. 6 et 4 pour EM6 et EM4 car celui-ci hériterait de leur technologie.

D’une impédance à l’origine plus élevée, celle-ci s’est vue abaissée à 98 ohms pour une sensibilité identique de 122db/mW. Sensible, donc,  mais doté d’une impédance relativement élevée pour un intra, celui-ci sera-t-il efficace en nomade ?

 

Présentation

Répondons d’abord à la question d’entrée. Oui, le SM64 est nomade, mais plus que son prédécesseur, il aura besoin d’ un baladeur puissant voire d’un ampli nomade pour révéler la majeure partie de ses possibilités notamment en terme de dynamique, bien plus importante que celle du SM3.

Le SM64 nous a été prêté deux fois, ce qui m’a permis de le faire essayer autour de moi. Ceux connaissant la signature EarSonics par ses universels, ont pu être quelque peu désappointés. Pour les autres, certains ont évidemment apprécié, d’autres n’ont pas eu l’effet wahou souvent attendu tout en reconnaissant par ailleurs ses qualités.

A propos des accessoires fournis, hormis la boîte qui diffère et un guide câble faisant le tour d’oreille plus court qu’habituellement, ils sont identique à ceux du SM3. Il vous est donc possible de vous référer au test du SM3 ici.

Le SM64 a été testé avec les embouts biflange en silicone, les mousses ayant tendance à réduire l’extension des aigus et des basses.

Tout aussi confortable que le SM3, son apparence change quelque peu puisqu’il laisse apparaître l’électronique  au travers de sa coque translucide . Il y a du monde là dedans dites donc !

Un SM dans la lignée des EM ?

6 et 4 plutôt que 4 pour donner suite au SM3, le SM64 est  un universel qui s’inspire des deux vaisseaux amiraux d’EarSonics plus que de la série universelle des SM. C’est en tout cas vrai  pour sa signature mais cela s’arrête là, car le SM64 est loin de sonner comme un moulé.  Et d’ailleurs, c’est plus de la signature  de l’EM6 que de celle de l’EM4, dont l’articulation et la présentation diffèrent clairement que le SM4 est proche. En effet le dernier né de la gamme ES sonne plus  technique et musical que musical et technique. Rigoureux, précis, il propose une présentation claire et sur scène, mais n’axe pas le focus sur l’articulation, l’imbrication des instruments dans la scène sonore globale. C’est un intra qui est relativement analytique, mais sans perdre en musicalité, car il est doté d’une bonne dynamique et donne envie de taper du pied à son écoute.

Il ne sonne donc pas comme le SM3. On ne retrouve pas le voile qui faisait d’une certaine façon la douceur du SM3. La patte de la marque sur le médium est moins marquée et les aigus sont beaucoup plus apparents. Toujours aussi travaillés sur leur finesse, ils ne s’effacent jamais et on y retrouve beaucoup de détails et de micro-détails. Le grave est contenu, un petit peu comme sur l’EM6 comparativement à l’EM4 et au SM3. On y retrouve plus son impact et sa rapidité.

On ne pourrait pas véritablement le considérer comme basseux. La présence des basses est indéniable, malgré leur douceur elles ont plus d’impact que celles du SM3 et descendent plus bas, sans pour autant être ce qu’il y a de plus claquant. Il n’est pas basseux non plus pour des raisons de positionnement et d’espace pris sur la scène. De manière générale la basse est derrière, on l’entend bien, mais souvent l’étagement présente d’autres instruments, comme les caisses claires, les guitares électriques ou les voix quand celles-ci sont présentes devant la scène. Malgré tout, la basse sonne fort et c’est un intra qui sait donner du réalisme dans le bas du spectre. Les peaux sonnent justes et sont bien plus réalistes que sur le SM3.

Son médium est détaillé et nuancé sur les timbres, mais les voix féminines perdent en douceur, pour tirer plus facilement sur l’aigu. En revanche, les voix masculines gagnent vraiment en réalisme et en détails.

L’aigu est fin, va très loin et dégagent beaucoup de détails, il n’est malgré tout pas agressif ou fatiguant. Il n’y a pas de sibilance. Il y a beaucoup de détails sur les cymbales, tout le jeu est perceptible, même lorsque la scène sonore est chargée.

Sa présentation est améliorée par rapport au SM3, elle gagne largement en réalisme, mais perd en douceur. Le SM64 n’est pas « dark » comme le SM3, la scène est ici éclaircie.

Le positionnement des instruments est précis et son étagement rigoureux, la scène s’étire proprement et sans débordement, sans bénéficier de la largeur de scène du SM3, ni d’une certaine manière de sa profondeur. Les effets ont moins d’espace pour véritablement se détacher et aller chercher en profondeur. Le tout est plus cadré et correspond plus à une scène de musique live, donnant quasiment l’impression d’être sur scène.

Plus de réalisme signifie que les timbres sont plus justes, mais aussi que l’impression holographique de la restitution est plus frappant. C’est effectivement le cas, le SM3 est un cran en dessous, mais on est loin de ce que l’EM4 ou l’EM6 offrent. On se rapproche fortement de ce que les ToGo 111 de FitEar propose dans le bas du spectre, avec de la matière et de la rapidité, même si le SM64 est plus doux et texture plus.

La signature du SM64 est donc globalement équilibrée (le positionnement des embouts pouvant jouer sur la restitution) celle-ci n’est ni basseuse ni brillante, claire comparativement au reste des SM, encore douce comparativement à nombre d’intras à armatures équilibrées.

 

Ressentis sur quelques titres

L’écoute, a été faite à partir d’un Sansa Fuze couplé à un Pico Slim de chez Head Amp. Cette combinaison suffit largement pour alimenter le SM64, mais il faut monter le volume plus qu’avec la plupart des autres intras. Ceci ne lui interdit pas de fonctionner sur tous les baladeurs sans difficulté, mais, il révélera tout son potentiel branché sur un bon amplificateur.

N’ayant pas réussi à rajouter la playlist Deezer, elle arrivera plus tard…

Down The Hole par John Campbell / The Dali CD

La basse est en retrait, mais elle reste bien perceptible. Le jeu de la caisse claire quant à lui est mis en avant. Il manque de détails sur ces deux instruments comparativement au reste de la scène, la voix est devant et prend beaucoup d’espace, avec du volume, même si elle manque quelque peu de nuance pour retranscrire toute l’émotion de ce titre.

Sa petite scène sonore ne suffit pas ici pour que les effets puissent naviguer, la profondeur offre de l’espace pour les détacher des autres instruments, mais trop peu pour leur permettre d’aller chercher en profondeur. La présentation confine finalement l’auditoire au devant de la scène.

Le SM64 doit sonner ici relativement fort pour tirer partie de sa dynamique.

 

Vibrasphere / Archipelago / Landmark

L’arrière de la scène apparaît voilé, alors que celle-ci ne se présente pas comme de l’ambient ou de la psy transe, mais plutôt comme une scène de concert. La basse arrive derrière, posée, mais sans aller chercher en profondeur, autant dans son approche que dans son impact. Un impact qui est contenu et qui manque ici de rapidité.

Sur ce style le SM64 ne convient pas à mon oreille, et ne correspond pas aux qualités requises : les effets ont de la place pour se déplacer mais pas suffisamment de profondeur pour se détacher.

 

Katie Melua / Piece by piece / On the road again

L’espace est ici très bien utilisé, les échos ont suffisamment de profondeur pour créer l’ambiance, mais pas pour aller plus loin. On perçoit bien les claquements de doigts au début de l’enregistrement, avec beaucoup de réalisme. Les instruments sont bien séparés, l’aération est bien perceptible entre eux. C’est dans ce style que le SM64 est certainement le meilleur : des instruments acoustiques, une voix, il est à l’aise et offre une excellente prestation.

Le SM64 présente la scène avec analytisme, le découpage est net mais reste bien musical.

 

Big House / Woodstock Nation / I Walk Alone

La scène se présente plus ancrée , c’est un intra qui est vraiment fait pour présenter ce type de chose avec précision, séparation, et une bonne spatialisation dans le positionnement des instruments. Pour ceux qui recherchent de la douceur sur les timbres et une musicalité plus importante il faudrait plus se tourner vers un SM3, plus dark.

La musicalité du SM64 est flagrante, le rythme de ce titre qui tourne rock prog est particulièrement entraînant.

 

The Alan Parson Project / Pyramide (1978) / In the Lap of The Gods

L’intra dévoile sur cet album sa signature claire, puisque laissant ressortir tous les instruments dont le registre tire plus dans le haut du spectre. Tout est bien présent, démontrant toute la technicité dont sait faire preuve le SM64 : la basse se présente toujours en fond de scène, la batterie se laisse bien entendre à côté d’elle au milieu, alors que les cymbales et les guitares électriques se détachent sur les côtés tirant l’intra dans les aigus. On ressent bien la dynamique, même à volume relativement bas, mais il perd en matière et en immersion. Avec beaucoup d’instruments la scène ne suffit pas pour contenir tout le monde ancré et dans un cadre aéré à la fois, mais on ne perd pourtant pas en séparation.

 

Public Enemy feat DMC / Most of My Heroes Still Dont Appear On No Stamp / Rltk 

On accroche facilement à la rythmique, on retrouve vite la basse qui tape derrière et donne le beat, Elle n’est d’ailleurs pas très bien texturée. Il faut dire que l’enregistrement n’est pas terrible non plus, mais l’EM4 rattrape plus le morceau que le SM64 en entourant le beat et en le mêlant plus harmonieusement aux autres instruments. La séparation est donc ici assez brutale

 

The Prodigy / Invaders Must Die / Thunder

Cette écoute donne envie de monter le volume pour la rendre plus immersive et gagner en matière. Cela n’en reste pas moins gorgé de détails et d’effets sur lesquels le SM64 réagit bien avec précision et vitesse. Il suit effectivement parfaitement bien le tout et avec bonne articulation. C’est vraiment une bonne surprise à la première écoute, pensant que sur ce style la présentation ne mettrait pas à l’honneur les effets. Tout est bien séparé, et avec la quantité de basse qu’il y a dans ce titre, le SM64 offre une excellente prestation : précision et détails dans un ensemble musical.

 

Morcheeba / Fragments of Freedom / World Looking In

La séparation est peut être un peu brutale, mais l’ensemble est parfaitement restitué, car la profondeur ne pâtit pas sur la voix en écho.

La présentation latéralise complètement les deux guitares, qui chacune joue de son côté. L’éloignement de la tête est vraiment faible et c’est certainement l’écoute qui m’a donné le plus l’impression d’avoir un son de tête.

 

 

Conclusion

Après un SM3 tout en douceur, le constructeur français EarSonics propose un SM64 plus brut, dont la dynamique, la précision sur tout le spectre, et le respect des timbres, notamment sur les peaux, le différencient bien de son prédécesseur.

Conclure  que le SM64 est une évolution et amélioration évidente du SM3 serait clairement exagéré, car s’ils n’ont pas la même signature, les qualités de l’un ne font pas les défauts de l’autre. A 50€ l’atrenative reste possible en fonction des gouts et des exigences de restitution de l’acheteur.

Malgré tout, si à l’époque le SM3 avait eu du mal à concurrencer le Westone 4 sur de nombreux points, le SM64 rattrape largement l’écart et dépasse ce dernier sur la dynamique, le volume spatial pris par les instruments, le détail dans les extensions du spectre. En revanche, le Westone 4 offrira une scène plus spacieuse et aérée mais bien moins organique, et restera encore d’un niveau de gamme très élevé dans l’universel, et ce malgré la concurrence accrue dans ce secteur depuis quelques années.

Même s’il faut pousser un petit peu plus le volume sur son baladeur qu’avec d’autres intras, le SM64 est largement utilisables sur les baladeurs et téléphones actuels, même si c’est au travers d’un bon décodage en amont qu’il montrera toutes ses qualités.

Le SM64 se range plus parmi les derniers modèles sortis par la concurrence, que sont les 4ai ou les ToGo!F111 que parmi l’ancien haut de gamme universel (Westone 4/SM3/..) car le réalisme dégagé par le volume des instruments est accru et ce sur quasi tout le spectre, chose qui auparavant manquait énormément aux intras à armature équilibrée.

Sa signature est organique, chaude en bas et plus claire en haut, qui d’une certaine façon renoue avec la douceur de la signature du SM3 sur les voix, tout en améliorant les points qui lui faisaient défauts (voile et aigu), ajoutant une dose d’analytisme savamment dosée. Des basses plus punchy et un aigu plus présent.

Il dispose d’une excellente extension dans les extrêmes ainsi que d’une bonne dynamique, le SM64 sait donner une bonne dose de réalisme à l’écoute nomade. La tessiture des timbres est juste, avec du détail qui laisse apparaître les réverbérations les plus infimes, notamment dans l’aigu.

Pour finir avec les défauts, la profondeur de sa scène est moyenne, ainsi que sa présentation en largeur qui a tendance à trop latéraliser, faisant ainsi perdre en cohérence à la scène. De même, bien qu’excellemment bien séparés, les instruments manquent parfois d’espace pour vraiment dégager leur ligne rythmique : le focus se retrouve souvent sur la ligne de basse ou les cymbales, perdant au passage un sens global à l’harmonie. Mais dans le genre analytique, il sera difficile de faire mieux dans cette gamme. Pour des styles musicaux nécessitant de l’espace et énormément de profondeur de scène il faudrait plutôt se tourner vers les 4ai d’Heir Audio.

En bref

Note : 8,5/10

+ dynamique et détaillé

+ bon rapport qualité/prix au vu de la prestation

+ excellentes extensions dans l’aigu, un peu moins dans le grave

+ gain en réalisme

+ nouveau guide câble plus court

 

– nécessite de monter le volume et diminue sensiblement l’autonomie

– scène sonore insuffisante sur certains styles

 

4 thoughts on “[Test] SM64 : la force tranquille”

  1. darkzenith

    Bon, ben, voilà: test parfait, très sensible et magnifiquement fouillé qui présente pour moi l’avantage assez exceptionnel de recouper ma propre expérience de ces écouteurs et de m’indiquer en même temps les qualités que j’ai loupés chez eux…
    Chapeau, Vic!

  2. Pingback: [Test] EarSonics ES2 et ES3, tout en musique | TellementNomade

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